
Au potager comme au champ, les limaces sont de véritables ravageurs de plantes. Pour lutter contre les populations de limaces naturellement, les agriculteurs peuvent compter sur le labour. En effet, le passage de la charrue peut perturber les limaces en retardant leurs attaques, et diminuer le nombre d'œufs hivernants. Cette pratique vient en complément de la lutte chimique anti-limaces.
Quelles sont les conditions favorables au développement des limaces?
Les limaces sont des ravageurs très présents dans les cultures avec 2 espèces prédominantes : la limace grise (Deroceras reticulatum) et la limace noire (Arion hortensis). 80% des attaques de limaces sont causées par des limaces grises en France. Plusieurs facteurs conditionnent le développement des limaces :
Limace grise ou Deroceras Reticulatum
Limace noire ou Arion Hortensis
Les conditions climatiques
- Le corps de la limace est constitué à 80% d'eau et se dessèche très rapidement d'où son besoin d'être constamment humide pour vivre et se déplacer.
- Les températures douces associées à un temps humide sont favorables au développement des populations de limaces.
- Les hivers avec peu ou pas de gelées favorisent la prolifération des limaces. Elles se réfugient dans les 15 premiers centimètres du sol et ressortent au printemps, à la levée des cultures.
La disponibilité en refuges
- Les limaces trouvent refuge dans des sols argileux et argilo-calcaires avec de nombreuses mottes.
- Elles peuvent également se nicher dans les résidus et les couverts végétaux.
- Les limaces pondent des œufs dans les 10 premiers centimètres du sol ce qui les rendent peu visibles. Les débris végétaux offrent un habitat propice à la ponte des œufs car ils apportent un bon niveau d'humidité et à l'abri des prédateurs éventuels.
La disponibilité en nourriture
- La limace parcourt en moyenne 3 mètres par jour. C'est pourquoi sa nourriture doit être proche de son lieu de vie.
- Omnivore, elle est capable d'ingérer jusqu'à 50% de son poids en nourriture.
- Les limaces se nourrissent essentiellement de jeunes pousses et de feuilles.
- Elles sont particulièrement friandes des cultures comme le tournesol, le colza, le maïs, les pommes de terre, les céréales, et les cultures fourragères.
Cycle de développement des limaces avec stades sensibles pour les principales cultures
- Ponte des œufs de limaces.
- Jeunes limaces grises sur une plante de maïs.
- Limaces des jardins avec un pied jaune-orangé bien visible.
- Limaces ibériques avec un pneumostome (trou de respiration) bien visible.
- Limaces grises lots de la copulation (hermaphrodites).
- Limace grise en train de pondre ses œufs.
Malgré leur faible mobilité, les limaces sont capables de faire des dégâts considérables dans les cultures du fait de leur capacité de reproduction rapide. Tout comme les escargots, les limaces sont hermaphrodites et peuvent ainsi se reproduire avec n'importe quel autre individu adulte. La limace peut pondre jusqu'à 100 œufs, et ce à 3 reprises dans l'année, entre août et octobre, pour une éclosion au printemps.
Quelles conséquences les attaques de limaces peuvent avoir sur les cultures?
Pertes de rendements
Les limaces sont responsables de pertes de rendements car elles se nourrissent aussi bien des feuilles que des graines des cultures. De ce fait, le développement des plantes est entravé voire anéanti si l'attaque a lieu au moment de la germination avec une perte de rendement partielle ou totale.
Développement de maladies
Dans les cas d'attaques sur des plantes en croissance, les feuilles sont visuellement trouées ouvrant ainsi la porte aux risques d'infections fongiques ou bactériennes sur la culture.
La fonte des semis est occasionnée par un champignon (le fusarium est souvent à l'origine des attaques des céréales) présent dans le sol et capable de contaminer tous types de cultures. Il s'en prend aux jeunes plants et entraîne le pourrissement de ceux-ci.
Le piétin échaudage atteint les blés et autres céréales à pailles. Le champignon cause le dessèchement et la putréfaction de la plante. Cette maladie est favorisée lorsque la culture qui précède est une céréale et en cas d'apport de pailles dans la parcelle.
A l'égal du piétin échaudage, le piétin verse s'attaque aux céréales à pailles. Les lésions occasionnées sur la plante engendrent des verses sporadiques dans la parcelle rendant la récolte difficile. De plus, les épis sont également atteints provoquant des pertes de rendements importantes.
Le labour, pour lutter contre les mycotoxines dans les cultures.
Les fusariotoxines sont des toxines produites par des champignons du genre Fusarium. Les principales mycotoxines résultant de ces champignons sont le déoxynivalénol (DON), la zéaraléone (ZEA) et les toxines T-2 et HT-2. En France, le DON est la toxine la plus couramment trouvée dans les céréales telles que le blé, l'avoine et le triticale. Ces molécules sont extrêmement stables et ne peuvent être détruites par les procédés de transformation habituels, ce qui permet leur présence tout au long de la chaîne alimentaire. À des doses élevées, elles ont des effets néfastes démontrés sur les animaux et sur les humains.
Des mesures de précaution sont indispensables, surtout qu'il est presque impossible d'éliminer complètement la menace posée par les mycotoxines (comme le semis précoce, l'irrigation, la gestion des résidus, ainsi que la lutte contre les ravageurs des cultures tels que les limaces et les insectes, etc.).
Le labour, en ensevelissant les sources d'infection, aide à diminuer le risque de contamination. Par exemple, l'enfouissement des pailles de céréales et des tiges de maïs non récoltées réduit la quantité d'inoculum. Sans cette pratique, le fusarium peut se maintenir à la surface et contaminer les cultures céréalières suivantes.
Quelles mesures agronomiques peuvent être mises en place pour lutter contre les limaces?
La période d'interculture est la plus propice à la propagation des gastéropodes. Dès lors, il est nécessaire de multiplier les passages d'outils de travail du sol pour perturber les déplacements des limaces et leur reproduction mais également mettre en surface les œufs déjà pondus en les exposant à la sécheresse.
Facteurs inhibant l'activité avant le semis | Facteurs favorisant l'activité avant le semis | ||
|---|---|---|---|
| Hiver avec gel | Hiver avec de longues périodes de gel (en dessous de -5°c) Un sol fortement gelé entraîne une mortalité importante des limaces - les œufs et les limaces hivernent mal | Hiver doux | Hiver sans longue période de gel Peu de gel dans le sol, d'où une faible mortalité des limaces - les œufs et les limaces peuvent passer l'hiver. |
| Faible degré de couverture du sol | Peu de protection contre le sec, peu de nourriture
Il y a toutefois un risque à proximité du bord de la parcell ! | Important degré de couverture du sol | Grande protection contre le sec, nourriture en abondance Résidus végétaux et fumier à la surface du sol, précédant cultural favorisant les limaces (p. ex. colza), engrais vert en croissance, adventices et repousses. |
| Forte intensité de travail du sol | Les cavités offrant un refuge sont détruites Rappuyage du sol, roulage après semis, lit de semences fin, plusieurs passages, sols légers. Risques avec les résidus incorporés dans le sol et le fumier ! | Faible intensité de travail du sol | Les cavités offrant un refuge sont maintenues Pas de rappuyage du sol, pas de roulage après semis, lit de semence grossier, peu de passages, sols lourds. |
| 🟡🟢 |
| 🟡🔴 |
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Facteurs inhibant l'activité après le semis | Facteurs favorisant l'activité après le semis | ||
|---|---|---|---|
| Culture peu sensible et/ou croissance rapide |
| Culture sensible, mal développée |
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| Temps sec☀️ | Temps humide 🌧️ | ||
| 🟢 | Peu de risques de dégâts de limacesIl est conseillé de faire occasionnellement des contrôles à la tombée de la nuit après le semis, surtout dans les cultures sensibles. | 🔴 | Grand risque de dégâtsUn contrôle régulier (tous les jours) à la tombée de la nuit contribue à éviter les dégâts économiquement significatifs. Si nécessaire recourir à des granulés anti-limaces (cf. seuil d'intervention page 4). |
Labourer pour réduire les attaques de limaces
La charrue vient détruire le milieu de vie (biotope) des limaces et enfouit les résidus végétaux situés en surface, propices à la prolifération. Lorsque le sol est labouré, les limaces et les œufs sont exposées à la sécheresse en surface et privées de nourriture.
Labourer juste avant le semis
Cependant, la période de labour doit être bien choisie. En effet, les limaces enterrées après le passage de la charrue peuvent survivre en profondeur en se nourrissant des résidus végétaux en décomposition. C'est pourquoi, le labour doit être réalisé juste avant le semis de sorte que les limaces n'aient pas le temps de remonter à la surface au moment de la germination de la culture implantée. Les limaces peuvent mettre entre 10 et 45 jours pour revenir en surface, en fonction de la nature et de l'humidité du sol.
Meilleure efficacité en sols limoneux
Cette technique de travail du sol est particulièrement efficace en sols limoneux puisqu'elle créée une terre bien émiettée sans source d'alimentation et avec une faible hydrométrie. Une situation défavorable pour les limaces et les escargots.
Rouler le sol juste après le semis
Aussi, il est conseillé de combiner le labour avec un roulage entre le semis à la levée pour détruire anfractuosités des sols motteux et poreux. Les limaces étant incapables de creuser le sol pour se déplacer, se retrouveront ainsi piégées.
En cas de semis direct, le roulage est plus que nécessaire car la présence de résidus végétaux associée à un positionnement en surface des graines augmente les risques d'attaques.
Les sillons doivent être bien refermés pour réduire l'exposition des graines sans quoi les limaces s'insèreront dans ces sillons ouverts pour consommer un grand nombre de graines avec de lourdes conséquences sur le rendement de la culture.
Le roulage est cependant déconseillé en sols limoneux battants.
Multiplier les déchaumages
En cas d'infestations répétitives, le déchaumage permet de se débarrasser des limaces en perturbant le biotope des limaces.
L'action de déchaumage créé une terre fine, asséchée et propre de tous résidus. De plus, le passage du déchaumeur endommage physiquement les limaces et expose les œufs à la lumière accélérant ainsi leur dessèchement.
Il est conseillé de pratiquer 3 déchaumages pour réduire significativement le risque limaces.
Jouer sur l'appétence des variétés dans la rotation culturale
Pour empêcher les limaces de se multiplier et de s'installer durablement, il est judicieux d'étudier la rotation culturale en alternant les plantes appétentes avec des cultures moins prisées par ces mollusques.
Les rotations blé/colza/orge sont particulièrement appétentes pour les limaces. Une des solutions est de rallonger la rotation en incluant des couverts végétaux moins appréciés des limaces comme la phacélie, la moutarde, la vesce ou le radis.
En complément des leviers agronomiques, la lutte chimique permet de maximiser les résultats pour neutraliser les limaces. Pour que le traitement soit performant, il faut que l'anti-limaces soit appliqué avant la levée de la culture, à une température supérieure à 5°C et de préférence le soir si aucune pluie n'est prévue. Les limaces sortant la nuit, les granulés épandus autour des plantes seront d'autant plus efficaces.
En agriculture biologique, il est possible d'utiliser des produits à base de phosphate de fer jusqu'à 15 jours après la levée pour tuer les limaces.
Les limaces sont la proie de prédateurs naturels comme les carabes dorés et violets, les nématodes, les hérissons, les crapauds, les taupes et les oiseaux. Ces alliés naturels doivent être préservés pour renforcer la lutte biologique contre les limaces et les loches, et ainsi limiter les dégâts sur les cultures.
Les bonnes pratiques à mettre en place afin de limiter les risques d'attaques de limaces dans les cultures :
Les bonnes pratiques à adopter :
- Labourer le sol juste avant de semer pour détruire leur milieu de vie
- Rouler la parcelle après le semis pour empêcher leur remontée
- Multiplier les déchaumages pour créer une terre fine et asséchée en surface
- Jouer sur l'appétence des cultures pour limiter leur développement

FAQ : Leviers agronomiques pour la lutte contre les limaces
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Le travail du sol vise à :
- Éliminer les sources de nourriture des limaces.
- Affiner le sol pour réduire les refuges et l’humidité.
- Entraver les déplacements des limaces.
- Exposer les limaces et leurs œufs à des températures élevées et à une faible humidité.
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Pendant les périodes de jachère, les méthodes suivantes peuvent être mises en œuvre :
- Broyage des résidus.
- Destruction chimique des repousses.
- Déchaumage précoce.
- Implantation de couverts végétaux peu appétents.
- Passages répétés d’outils, y compris un labour juste avant le semis.
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Lors du semis, il est conseillé d’éviter le semis direct en cas de risque de dégâts. Il faut veiller à :
- Préparer un lit de semences fin et bien refermé pour limiter les déplacements des limaces.
- Semer les graines à une profondeur régulière, en évitant qu’elles restent en surface.
- Augmenter la densité de semis en cas de risque élevé de dégâts.
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Les passages répétés perturbent l’activité et la multiplication des limaces en modifiant leur habitat et en entravant leurs déplacements.
Sources:
- https://www.arvalis.fr/sites/default/files/imported_files/414_3682949301957769189.pdf
- https://www.arvalis.fr/infos-techniques/controler-les-limaces-en-associant-leviers-agronomiques-et-lutte-chimique
- https://www.bayer-agri.fr/cultures/limaces-a-chaque-culture-sa-propre-vulnerabilite_1047